En présence d’un auditoire composé, pour la grande majorité, d'entrepreneurs d'étudiants, Etzer Emile a passé en revue la performance du pays pour le dernier exercice avec un produit intérieur brut (PIB) qui ne cesse de chuter, une croissance économique négative, des investissements publics ne dépassant pas les 90 millions de dollars américains, des recettes domestiques avoisinant les 31% des dépenses totales de l’État et un secteur bancaire porté par la vente des devises américaines. Par rapport à ce climat d’échec et de déficit d’initiatives, l’économiste avance cinq considérations incluant à la fois problèmes et solutions.
L’histoire et le présent ont guidé une partie du raisonnement de l’économiste. C’est une économie qui ne produit pas de richesses. En témoigne le PIB et la croissance économique du pays pour les trois dernières années. La situation devient encore plus corsée quand on fait le rapprochement entre croissance économique et croissance démographique. Des données qui démontrent plus clairement que l’Haïtien devient plus pauvre chaque année.
Ajoutez à tout cela les grandes vagues de libéralisation du marché en 1987 et en 1995, sans oublier la période de l’embargo, les catastrophes naturelles et les crises sociopolitiques à répétition. La question économique a rarement été prise en compte dans l’agenda politique des différents régimes qui se sont succédé.
Quoiqu’on soit dans une situation urgente de redressement économique, Etzer Emile croit qu’on doit prendre le temps de tout remettre en place. Le quick réponse ne fonctionne pas toujours. Il invite, par ailleurs, les décideurs à surseoir aux petits projets. Les balises sont, a-t-il fait savoir, aussi importantes que les réalisations. Ainsi, a poursuivi le conférencier, en vue de ce redressement, ce n’est plus le temps de réformer mais de transformer en commençant par la fiscalité.
Le redressement, assure l’économiste, est une chose profonde. Il déplore le fait que fiscalité rime avec recettes dans le pays. La transformation prônée par Etzer Emile est que la fiscalité devienne un objet économique, une fonction économique. Il est inconcevable, a-t-il déploré, que les prêts de l’État soient orientés vers le fonctionnement. « Cette nouvelle façon de faire doit prendre également en compte l’éducation de nos enfants. Elle doit également toucher cette administration publique anti-investissement, anti-croissance ».
« C’est le temps d’un replâtrage complet », a ajouté l’intervenant, ajoutant qu’avant toute chose, il s’avère nécessaire qu’on définisse un modèle économique. Pour le moment, a-t-il constaté, c’est un modèle basé sur l’importation qui prévaut dans le pays. « Comment redresser la barre dans une telle économie ?», s'est-il questionné, mentionnant également la concentration du marché où les 18 produits les plus consommés dans le pays sont dans une situation d’oligopole.
Ainsi, le redressement prendra du temps, a prévenu M. Emile. Il en faut beaucoup pour changer la donne. Pour y parvenir, Etzer Emile promeut un État développementaliste, un État avec des initiatives. Donc, il faut commencer par redresser l’État, car, a-t-il insisté, le développement économique n’est pas sorcier. Il faut toute une planification, tout un cheminement. « On doit commencer par rompre d'avec la création des petits projets pour mettre l’emphase sur la planification sur le long terme », a-t-il recommandé.
Le Nouvelliste